Rebecca de Daphné du Maurier — Chronique n°216

"Nous avons tous en nous un démon qui nous harcèle et nous tourmente, et il faut finir par lui livrer combat."

Titre : Rebecca
Auteure : Daphné du Maurier
Genre : Thriller | Classique
Éditions : Le Livre de Poche
Lu en : français
Nombre de pages : 632
Résumé : Sur Manderley, superbe demeure de l'ouest de l'Angleterre, aux atours victoriens, planent l'angoisse, le doute : la nouvelle épouse de Maximilien de Winter, frêle et innocente jeune femme, réussira-t-elle à se substituer à l'ancienne madame de Winter, morte noyée quelque temps auparavant ? Daphné du Maurier plonge chaque page de son roman - popularisé par le film d'Hitchcock, tourné en 1940, avec Laurence Olivier et Joan Fontaine - dans une ambiance insoutenable, filigranée par un suspense admirablement distillé, touche après touche, comme pour mieux conserver à chaque nouvelle scène son rythme haletant, pour ne pas dire sa cadence infernale. Un récit d'une étrange rivalité entre une vivante - la nouvelle madame de Winter - et le fantôme d'une défunte, qui hante Maximilien, exerçant sur lui une psychose, dont un analyste aurait bien du mal à dessiner les contours avec certitude. Du grand art que l'écriture de Daphné du Maurier, qui signe là un véritable chef-d'oeuvre de la littérature du XXe siècle, mi-roman policier, mi-drame psychologique familial bourgeois.

-----------------------------------------------------

Rebecca est très certainement l'un de mes romans préférés. Bien qu'âgé de presque quatre-vingts ans, il est si intense, si riche et si prenant qu'il ne parvient tout simplement pas à vieillir. Il trouvera forcément sa résonance en chacun d'entre vous, vous fera passer par une multitude d'émotions, et vous fera sacrifier des heures de sommeil.

Rebecca décrit le parcours d'une jeune femme naïve et innocente dont on ignore le prénom, fraîchement mariée à Maximilien de Winter, qui découvre le somptueux domaine de ce dernier, Manderley... Mais qui s'aperçoit bientôt de la place étouffante qu'occupe encore le spectre de la première femme de son époux, Rebecca, morte noyée à peine un an plus tôt. Au fil des jours, des semaines, cette présence irrationnelle se fait obsédante et insupportable... Jusqu'à quel point ?
Cette intrigue peut paraître un peu plate, commune, pour constituer une œuvre réellement spectaculaire, et pourtant elle se révèle d'une richesse rare. Doublée d'une atmosphère oppressante travaillée à la perfection et nourrie par le talent de Daphné du Maurier pour la suggestion et la description, elle donne naissance à un roman unique en son genre, dans lequel tout est subtil, sous-entendu et réfléchi.

On se sent aussi démuni et ignorant que la narratrice, on enchaîne compulsivement les chapitres – je confesse humblement qu'il m'est arrivé de lire certains passages debout. Je n'avais même pas la patience de prendre le temps de m'installer –, on frémit d'horreur, on est charmé par la plume limpide de Daphné du Maurier et par les descriptions somptueuses qu'elle fait de Manderley. Les couleurs, les odeurs, les sensations sont visibles ou palpables, et le domaine devient personnage principal du roman, hôte du fantôme de Rebecca... une véritable expérience sensorielle !

Il doit s'agit de ma troisième lecture de ce roman, et chaque découverte s'avère plus riche que la précédente : je suis frappée par des aspects différents, j'envisage certaines scènes de manière nouvelle... Impossible de me lasser de ce mélange parfaitement équilibré et toujours élégant de thriller, d'horreur et de mystère !
On se replonge dans Rebecca avec une facilité inouïe, on s'imprègne de son intrigue et de l'atmosphère de Manderley à chaque fois un peu plus profondément, on vibre toujours autant, ressentant la tension croissante, et redoutant le final spectaculaire.

Un dernier mot enfin à propos de la nouvelle traduction en français, que j'ai trouvée très réussie, plus fluide et abordable que la version précédente un peu datée. Vous n'avez plus aucune excuse pour ne pas vous lancer !

En bref, un livre exceptionnel qu'il faut – et j'insiste sur ce point – découvrir à tout prix, à condition toutefois de sacrifier toute vie sociale durant toute la durée de votre lecture. Les personnages vous fascineront, l'intrigue vous fera frissonner... Un classique qui aurait pu être écrit aujourd'hui ! 

Note attribuée : 10/10 : allez, petit lecteur, va mettre ce roman dans ta valise. Tu me remercieras plus tard.

Commentaires

  1. Pour une fois, je suis au regret de t'annoncer que nos avis diffèrent... C'est probablement parce que j'ai vu en premier et adoré l'adaptation de Hitchcock, et quand je me suis mise au roman, on va dire que je n'ai pas réussi à m'adapter à cette atmosphère, cette manière de décrire... MAIS, je te promets que je relirai ce roman, et j'espère vraiment que cette fois-là j'apprécierai mieux l'histoire !
    (excuse-moi. Ne sois pas déçue de moi, por favor)

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. J'ai vu le film après avoir lu le livre, cela doit sans doute expliquer partiellement nos ressentis différents...
      JE SUIS TRÈS DÉÇUE. Mais je te pardonne puisque tu vas le relire... :3

      Supprimer
  2. Ça c'est de la chronique ! Bravo :)
    Je dois dire que je ne connaissais pas ce roman mais après lecture de ta chronique et du résumé, j'ai très envie de découvrir cette ambiance si particulière :D

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Haha, merci ! L'important est désormais que tu le découvres ;)

      Supprimer

Enregistrer un commentaire

Posts les plus consultés de ce blog

Pourquoi faire un film en noir et blanc en 2021 ? [Capucinéphile]

La Disparition de Stephanie Mailer de Joël Dicker - Chronique n°426

Une Femme d'Anne Delbée - Chronique n°427

J'avoue que j'ai vécu de Pablo Neruda - Chronique n°517

À la place du cœur d'Arnaud Cathrine — Chronique n°241