Vous parler de ça de Laurie Halse Anderson — Chronique n°74

"Il m'arrive parfois de considérer le lycée comme une longue période de bizutage : si vous êtes assez solide pour survivre à ça, on vous donne la permission de devenir adulte. J'espère que le jeu en vaut la chandelle."

"Je sais que j'ai l'esprit en vrac. Je veux partir, déménager, me téléporter dans une autre galaxie. Je veux tout raconter, rejeter la culpabilité, la faute et la colère sur quelqu'un d'autre. Il y a une bête dans mon ventre, je l'entends gratter sous mes côtes. En admettant que je réussisse à me débarrasser du souvenir, cette bête restera avec moi et continuera à me souiller."

Titre : Vous parler de ça
Auteure : Laurie Halse Anderson
Genre : YA | Contemporain
Éditions : La Belle Colère
Nombre de pages : 299
Résumé : Melinda Sordino ne trouve plus les mots. Ou plus exactement, ils s'étranglent avant d'atteindre ses lèvres. Sa gorge se visse dans l'étau d'un secret et il ne lui reste que ces pages pour vous parler de ça. Se coupant du monde, elle se voit repoussée progressivement par les élèves, les professeurs, ses amis, et même ses parents Elle fait l'expérience intime de la plus grande des injustices : devenir un paria parce que ceux dont elle aurait tant besoin pensent que le mal-être, c'est trop compliqué, contagieux, pas fun. Melinda va livrer une longue et courageuse bataille, contre la peur, le rejet, contre elle-même et le monstre qui rôde dans les couloirs du lycée.

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Je suis tombée par hasard sur ce livre en librairie, en vacances – je sais, je passe beaucoup de temps en librairie. Sa couverture en carton m'avait beaucoup intriguée, de même que son titre de "best-seller aux États-Unis". Le soir même, j'ai lu l'avis très enthousiaste de Dune (sa chronique) du blog Freedom, Dreams & Books. Dès le lendemain, j'ai couru à la librairie et me suis empressée de l'acheter... Il ne s'agit pas du coup de cœur que j'attendais, mais Vous parler de ça reste une très belle lecture.

L'histoire s'étale sur une année scolaire, et commence donc logiquement à la rentrée. Melinda rentre en Seconde, et appréhende beaucoup ce retour au lycée. Elle ressent un profond mal-être, et ses amies ne lui parlent plus. Elle évoque parfois ça, sans jamais le nommer, sans expliquer ce traumatisme qui la détruit petit à petit. Tout au long du livre, on suit sa dégradation, sa solitude de plus en plus prononcée, sans en connaître la cause...

Le livre est composé de très courts chapitres qui sont des scènes du quotidien de Melinda, à propos de ses professeurs, de son lycée, de sa famille ou de ses amis. S'il y a bien quelques longueurs dans la première partie, j'ai bien aimé cette présentation, qui me poussait à lire encore un chapitre, et encore un, et un autre...

Melinda est un personnage extrêmement touchant. Ce qu'elle traverse est épouvantable, elle est rejetée par tous ceux à qui elle tient, voit ses notes dégringoler et s'enferme progressivement dans le mutisme. Je me suis beaucoup attachée à elle, souhaitant tout au long du livre qu'elle parvienne à se sortir de son mal-être, frémissant devant chacune des injustices qu'elle subit. On se sent terriblement impuissant, on ne peut pas s'empêcher de se mettre à la place de Melinda. J'adore me sentir impliquée dans un roman, et ça a vraiment été le cas ici.

Vous parler de ça aborde des sujets révoltants, presque tabous, comme le harcèlement scolaire, la solitude, le viol, mais toujours avec finesse. Il ne peut pas laisser ses lecteurs indifférents, et je pense que c'est pour cela qu'il a connu un tel succès aux États-Unis – là-bas, il est sorti en 1999, et il s'agit d'un "presque classique" (la traduction française a... pris son temps). Dire qu'il s'agit d'un premier roman !

J'ai beaucoup aimé les quelques réflexions sur l'art qu'on peut trouver dans ce roman, à travers les cours de M. Freeman, professeur d'arts plastiques, qui va jouer un rôle crucial dans la "renaissance" de Melinda. C'est le personnage le plus intéressant après Melinda. 
En fait, j'avoue que la plupart du temps, j'avais surtout envie d'égorger le reste des personnages secondaires, en particulier les "amies" de Melinda qui la rejettent parce qu'elles n'ont pas le courage de la soutenir. Non, je ne suis pas violente. Juste émotive.

La fin m'a un peu déçue, peut-être un peu fade comparée au reste du livre, qui lui est d'une intensité rare. Bien sûr, c'est une belle fin, peut-être un peu "américaine", mais je suis restée un peu sur ma faim – désolée pour le jeu de mots pitoyable, je n'ai pas pu m'en empêcher. Pardon.

En bref, un roman parfois dur, mais plein d'espoir, avec des passages poignants, porté par une héroïne inoubliable. Vous parler de ça m'a beaucoup touchée, j'ai continué à y penser des jours durant, et j'ai eu beaucoup de mal à en écrire la chronique. Une histoire dont on se souvient longtemps.
Note attribuée : 8/10

Commentaires

  1. Je l'ai lu il y a pas longtemps et j'ai vraiment beaucoup aimé :)

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  2. Ca a l'air d'être un joli roman ! Tu m'as donné envie de le découvrir donc merci pour ton avis ;)

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  3. Je ne connaissais pas ce livre mais tu m'as donné envie de le découvrir :)

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    1. N'hésite pas à l'acheter, c'est une jolie découverte ^^

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  4. Tout comme toi, je suis tombée par hasard sur ce livre, attirée par sa couverture. J'aurais bien aimé l'acheter malheureusement je n'avais pas d'argent sur moi (triste vie). Depuis j'ai lu quelques avis et ils sont dans l'ensemble positifs. C'est dommage concernant la fin. J'espère pouvoir me le procurer, c'est un roman qui est dans le top de ma wishlist.

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    1. Haha, les finances des passionnés de livres, ça ne pardonne pas :p Triste vie...
      J'espère vraiment que tu auras l'occasion de le lire !

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  5. J'ai bien aimé ce livre, le truc c'est que je l'ai lu après "il faut sauver Zoé" et "love letters to the dead". Seulement ces trois livres racontent, à peu de choses près la même histoire, du coup même si je l'ai bien aimé, l'histoire m'a un peu lassée.

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    1. C'est sûr que tu as dû complètement saturer des histoires de filles violées et dépressives xD

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