Les Trois Médecins de Martin Winckler - Chronique n°466

Titre : Les Trois Médecins
Auteur : Martin Winckler
Editions : Folio 
Genre : Contemporain
Lu en : français
Nombre de pages : 768
Résumé : Un médecin, ça n'a pas toujours été médecin. Il a bien fallu qu'il le devienne. Bruno Sachs, le personnage déjà rencontré dans La Vacation (POL, 1989) et La Maladie de Sachs (POL, 1998), n'échappe pas à la règle. S'il est devenu le médecin qu'il est devenu, c'est grâce, malgré ou à cause des longues années de formation qu'il a passées à la faculté de médecine de Tourmens, dans les années soixante-dix.
Raconter ces sept années de faculté, c'était montrer que devenir médecin c'est vivre plusieurs romans à la fois : un roman de... formation médicale, bien sûr ; mais aussi un roman d'amour ; un roman qui parle de pouvoir et de politique ; un roman sur l'amitié ; un roman où l'on vit, où l'on se bat et ou l'on meurt - bref, un roman d'aventures.

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Houston, nous avons un problème. 

Que dites-vous ? A propos de ce livre ? S'il ne m'a pas plu ? 
Non, non, rien à voir.

Le problème, c'est qu'à force, un jour, bientôt, j'aurai lu tous les romans de Martin Winckler, et il me faudra prendre mon mal en patience pour en découvrir de nouveaux. 

Bon. 
Reprenons.

Ce roman, tout comme les deux ouvrages de l'auteur que j'ai pu découvrir auparavant, est tout bonnement formidable, je n'ai plus aucune objectivité en ce qui concerne Martin Winckler, et je vais désormais entreprendre une démarche de prosélytisme assumé dans le but de vous faire courir de façon aussi immédiate que possible chez votre libraire. 

Ne me remerciez pas.

Les Trois Médecins, c'est, comme cet écrivain nous y a habitués, un roman aussi foisonnant que palpitant, structuré par de très nombreux chapitres racontés depuis des points de vue tout aussi multiples, porté par un message fondamental autour de ce que signifie être médecin et donc soignant, et surtout de ce que cela ne signifie pas, et de ce que cela devrait signifier. 

Le roman propulse le lecteur dans la jeunesse de Bruno Sachs, médecin protagoniste du roman La Maladie de Sachs, que l'on retrouve à son arrivée à la fac de médecine de Tourmens, fraîchement rentré en France après deux ans en Australie. Le jeune homme, fils de médecin lui-même, se plonge donc dans ses études, et va rencontrer dans ce cadre un trio d'étudiants tout à fait différents mais ô combien complémentaires : Christophe, Basile et André. 
Le quatuor ainsi formé navigue très vite dans les bouillonnements des années 70, particulièrement intenses dans le milieu de la médecine. Accès à la contraception, bataille pour le droit à l'avortement, réforme du système de santé, controverses autour des études de médecine et des injustices qui y sévissent, les dossiers sont aussi nombreux que lourds. Les quatre amis, effarés par certaines des réalités dont ils sont témoins, enthousiasmés par d'autres, décident très vite de se constituer porte-paroles des causes qui leur tiennent à coeur, et entament par là même le début de leurs carrières de soignants.

Le livre en lui-même peut paraître imposant, mais se dévore à une vitesse assez intersidérale. La structure découpée en très courts chapitres et très fréquents changements de narrateurs y est pour beaucoup, la plume ô combien sensible de Winckler également, le propos captivant et toujours d'actualité évidemment. Il est assez fascinant de voir que si, certes, plusieurs décennies ont passé et les enjeux ne sont pas tout à fait les mêmes, les causes plaidées par Sachs et consorts sont d'une pertinence aussi criante. La nécessité de former les étudiants en médecine au contact avec d'autres êtres humains avant la rencontre avec des pathologies, de faire d'eux des soignants plutôt que des débusqueurs de maladies rares, de toujours valoriser la parole du patient plutôt que les préconceptions du médecin. 

Ce sont des ouvrages que l'on devine éminemment érudits et recherchés, et qui peuvent devenir des contributions essentielles à des débats de fond, mais qui sont par ailleurs toujours extrêmement prenants, romanesques, touchants sur le plan humain, et bien sûr accessibles. Les romans de Martin Winckler sont la parfaite alliance entre la force de la fiction et l'urgence du réel, le pouvoir hypnotique de personnages de papier et le besoin douloureux de réparer le réel. Ce sont des histoires de vie, de mort, de ce qui se joue entre les deux, de volonté d'embrasser l'un ou l'autre, d'humains un peu perdus, un peu cruels, souvent tendres, bref, ce sont des histoires précieuses.

Et il est plus que temps pour vous de les découvrir.

(Et je n'ai aucune objectivité.)

Commentaires

  1. Je n'ai jamais découvert Martin Wincler et je dois dire que tu me donnes envie de le découvrir :)

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