La Dormeuse de Catherine Rolland - Chronique n°557

 Titre : La Dormeuse
Autrice : Catherine Rolland
Genre : Fantastique
Editions : Okama
Nombre de pages : 492Date de parution : 2021
Résumé : Une écrivaine aveugle engage une auxiliaire de vie pour écrire son dernier roman. Une jeune fille, revenue d'entre les morts, retourne à Pompéi pour chercher les clefs de son passé. Un savant et son neveu, un riche commerçant amoureux d'un esclave, une petite fille enjouée et son inséparable chiot mènent une existence paisible et routinière en baie de Naples, au pied d'une montagne nommée Vesuvio. Trois époques différentes. Des destins qui s'entremêlent. Une aventure sans précédent. Parviendront-ils à empêcher une tragédie qui a déjà eu lieu?

-------------------------------------------------------------

Lorsque Sofia est engagée comme auxiliaire de vie de son écrivaine préférée, on la prévient certes que la vieille dame est dotée de ce qu'on peut appeler un sacré caractère, mais cela ne l'empêche pas de tomber des nues lorsqu'elle découvre combien Marie Montero est véritablement quelqu'un d'assez acariâtre, si ce n'est profondément aigri. Qu'à cela ne tienne, Sofia tient au job, alors elle s'applique, fait de son mieux, et finit par atteindre une forme de relation à peu près fonctionnelle avec la romancière, au point que celle-ci, rendue aveugle par l'âge, fait de Sofia sa scribe attitrée. Marie a en effet un ultime roman à raconter, une fiction, 100% fiction, comme elle tient à le rappeler à une Sofia qui note souvent les similitudes troublantes que le parcours de l'héroïne de cette nouvelle histoire présentent avec l'historique de vie de Marie. Séance d'écriture après séance d'écriture, tandis que Marie s'accroche à son histoire de fiction et que Sofia copie le tout avec diligence, des pans de vérité s'alignent, des questions troublantes se posent, et la tête de l'auxiliaire de vie s'emplit de tout un tas d'hypothèses plus ou moins mystiques, toutes plus ou moins liées à l'histoire de l'éruption du mont Vésuve à Pompéi, en août 79...

La Dormeuse est un roman prometteur dans sa structure, son ambition narrative, ses thématiques, et il faut lui reconnaître un vrai travail de recherche et une solide connaissance des enjeux, notamment historique, que son intrigue lui fait aborder. La reconstitution du Pompéi de 79 est franchement convaincante, le concept même autour duquel s'articule le récit plutôt plaisant, et l'autrice parvient à mener le tout de façon cohérente sur 500 pages. Le problème, c'est que le tout manque quelque peu de distinctivité, d'audace, que ce soit sur le fond ou la forme : la plume en elle-même reste très descriptive, ne s'autorise pas vraiment de petites tentatives de style, sert son intrigue plus qu'elle ne l'incarne et la sublime, et si elle est tout à fait fluide, elle ne va pas non plus marquer le lecteur ou l'emporter dans une émotion particulière. La structure en elle-même est quelque peu déséquilibrée : on passe beaucoup, beaucoup de temps dans les premières dizaines de pages avec Sofia et Marie, dans une narration pas franchement très folichonne où l'on aligne un peu les poncifs dans l'attente de la vraie intrigue, puis le déclenchement des allers-retours entre passé et présent, avec des séquences dans le passé bien plus intéressantes que la narration présente, au point qu'on a pratiquement envie de sauter les pages consacrées au point de vue de Sofia. L'intrigue située à Pompéi est en effet clairement la force de l'histoire, et suscite un véritable intérêt des centaines de pages durant, jusqu'à ce que son dénouement assez prévisible se fasse deviner, après quoi on assiste à un final efficace mais pas si original, à l'exécution un peu déséquilibrée, et qui laisse un arrière-goût quelque peu bancal, tant ce dénouement semble avoir été précipité, d'autant plus quand on le compare à l'introduction particulièrement lente.

Il s'agit donc d'un roman semé de bonnes intuitions, qui témoigne d'une vraie méticulosité et d'une construction plutôt entraînante, qu'on lit avec facilité une fois le premier tiers dépassé, mais qui reste assez classique dans sa facture comme dans son exécution, et qu'on aurait aimé voir prendre davantage de risque tant au niveau de son écriture que de son intrigue et surtout de ses personnages, dont les histoires d'amour n'ont rien de réellement distinctif, et encore moins d'attachant, et semblent relever d'outils de narration plus que de relations réellement incarnées. Dommage... 

Commentaires

Posts les plus consultés de ce blog

Pourquoi faire un film en noir et blanc en 2021 ? [Capucinéphile]

J'avoue que j'ai vécu de Pablo Neruda - Chronique n°517

Une Femme d'Anne Delbée - Chronique n°427

U4 – Koridwen d'Yves Grevet — Chronique n°120

Le Choix d'Isabelle Hanne [Littérature]