Mes meilleures lectures de l'année 2019

Bonjour à tous et toutes !

C'est un petit rituel tout à fait satisfaisant et même assez salutaire pour ceux qui, comme moi, doivent souvent répondre à la question "et alors, c'est quoi ton livre préféré ?" ou "tu me recommandes quoi de bien, parmi ce que tu as lu dernièrement ?" : faire son bilan littéraire chaque année, structurer tout ce que l'on a pu lire, être frappé par l'évidence d'un coup de cœur qu'on n'aurait pas cru possible, réaliser au contraire que certaines lectures dont on croyait qu'elles seraient marquantes en les achevant se sont finalement assez vite estompées, avoir, déjà, des envies de relecture. 

L'année 2019 a été très intéressante pour moi d'un point de vue littéraire - et pas que, mais on y reviendra dans un prochain article -, avec des hauts, des bas, des périodes où les coups de foudre romanesques s'enchaînaient (la fin de cet été fut à cet égard assez exceptionnelle) et d'autres où au contraire, pratiquement aucun titre ne trouvait grâce à mes yeux (avec malheureusement des mois de novembre et décembre assez décevants). Je suis très heureuse de ce bilan, avec 132 livres lus au total, dont beaucoup de nouveaux auteurs et autrices, et 2020 débute pour moi avec un enthousiasme toujours renouvelé et un grand nombre d'envies de lecture dont je vous parlerai très vite !

Voici donc - et parce que c'est un peu l'objet de l'article -, in no particular order, les 12 livres qui m'ont le plus hantée, époustouflée, surprise et retournée tout au long de l'année écoulée. Il y en a pour tous les goûts, tous les genres, toutes les attentes, il y a du populaire et du confidentiel, mais je peux vous garantir une chose : choisir l'un de ces titres, c'est vous garantir un moment de lecture mémorable. 
Jolis jolis monstres de Julien Dufresne-Lamy : peut-être mon roman préféré de l'année, en tout cas celui que je ne me lasse pas de recommander à tour de bras, peu importe la personne en face de moi. Un livre onirique, poétique, traversé d'un profond respect pour les personnages qu'il décrit sans non plus se départir d'un certain humour, touchant, éblouissant, Jolis jolis monstres révèle une plume inouïe, un sens de la description admirable, et donne à voir une passion telle qu'on n'en voit pas si souvent dans les romans. Une magnifique plongée dans un univers en-dehors de tout, et une excellente introduction à la culture et à l'histoire drag pour les néophytes. 
The Secret History/Le Maître des Illusions de Donna Tartt : un livre auquel je ne cesse de penser depuis que j'en ai tourné la dernière page, et dont j'ai eu terriblement envie de trouver un équivalent, une sorte de frère jumeau littéraire, pour me remettre de ce sentiment merveilleusement frustrant qu'est le manque d'un livre qu'on a adoré. (J'ai tenté Le Complexe d'Eden Bellweather notamment, pas mal mais clairement pas du niveau de The Secret History). Difficile cependant de trouver un ouvrage pareil à celui-ci, aussi intense, perturbant, complexe, plongé dans un univers aux codes aussi fascinants, parcouru d'un mystère qui fait sens sans non plus jamais révéler ses innombrables couches de complexité. A lire, maintenant, tout de suite, très vite.
Laëtitia ou la fin des hommes d'Ivan Jablonka : un essai glaçant, engagé, respectueux, minutieux, abasourdi et abasourdissant, qui revient sur un fait divers datant de 2011 qui avait à l'époque agité tout le pays des semaines durant. Jablonka y cherche à la fois à faire lumière sur les circonstances épouvantables de l'affaire, mais aussi et surtout à révéler en quoi un tel crime est révélateur de structures et d'enjeux loin d'être anecdotiques. Lecture éprouvante, mais nécessaire.
Le Mur Invisible de Marlen Haushofer : petit phénomène littéraire du printemps, le roman allemand Le Mur Invisible a connu un regain de popularité à la suite d'une chronique de la fantastique dessinatrice Diglee. Mélange de nature writing, roman initiatique et survival novel, cet ouvrage étonnamment précurseur imagine le sort d'une femme livrée à elle-même, coupée d'un monde apparemment détruit, qui entreprend d'organiser sa survie, jour après jour, sans même savoir pourquoi, et se retrouve à questionner l'intégralité de ses choix de vie... Un texte tout simple en apparence, terriblement marquant en réalité, formidablement pertinent sur les questions de l'identité, de l'accomplissement, de la mort, du talent, de la communauté, de l'humanité. On aime, on adore.
A la ligne de Joseph Ponthus : très beau premier roman, saccadé, éprouvant, qui remet concrètement les idées en place. L'écrivain, qui se confond régulièrement avec son narrateur, délivre quelques fragments de son quotidien en tant qu'ouvrier, des feuillets d'usine comme il le dit lui-même, au moyen d'une plume limpide, brutale, acérée, poétique et glacialement pragmatique à la fois. Une petite claque littéraire et humaine à la fois.
My Absolute Darling de Gabriel Tallent : une lecture dont je ne me suis sans doute pas totalement remise, même un an après en avoir achevé le dernier chapitre. L'ouvrage est devenu un phénomène dans le monde anglophone aussi bien qu'en France (où il est publié aux éditions Gallmeister). Son contenu éprouvant peut en faire une lecture difficile pour les plus sensibles, mais croyez-moi, vous n'êtes pas près d'oublier ce portrait déchirant d'une jeune fille manipulée par un père violent et paranoïaque qui la contraint à vivre avec lui, reclus aussi loin que possible du reste de la civilisation. Effroyablement marquant.
Héritières de Marie Redonnet : je ne m'attendais en toute honnêteté pas à être autant marquée par cet ouvrage, qui réunit trois romans de Marie Redonnet, trois novellas pour prendre un terme anglais, tous centrés autour d'un personnage féminin isolé, dépossédé, et fermement combatif. Les trois héroïnes s'accrochent chacune à leur façon à un héritage, à un souvenir, d'une façon éblouissante et glaçante à la fois, le tout narré par une plume sensorielle et acérée. Inoubliable, dérangeant, avec une atmosphère trouble et obsédante que l'on a envie de rapprocher de celles de certains contes de fées.
Lolita de Vladimir Nabokov : un immense classique, bien sûr, que je voulais lire depuis longtemps sans jamais vraiment oser. Grand bien m'a pris d'enfin me jeter à l'eau : ce récit splendidement écrit, terriblement bien construit, témoigne d'un génie machiavélique de la part de son auteur, et rend le lecteur viscéralement accroché à la narration magnétique d'un personnage principal détestable, mais dont on ne peut rester insensible à l'emprise. Difficile de dire quoi que ce soit qui n'ait pas déjà été répété à l'envi sur cet ouvrage, je me contenterai donc de conclure avec ces mots : lisez. Lolita. Maintenant. C'est très bien. Vraiment très bien. C'est la base de tout un héritage de fictions, c'est un discours glaçant sur la nature humaine, c'est un sommet de littérature tissé de mensonges, de dissimulations et de jeux avec le lecteur. Formidable. 
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N'essuie jamais de larmes sans gants de Jonas Gardell : l'un de ces romans dont je savais que j'allais l'adorer et au sujet duquel je ne me suis clairement pas trompée. Chronique des années sida, portrait bouleversant de jeunes personnages en quête d'eux-mêmes et paralysés par des circonstances qui les dépassent, ce bon petit pavé de plus de 800 pages se dévore avec émotion, et de nombreux passages souvent très poétiques restent longtemps imprimés dans l'esprit du lecteur. A découvrir sans hésiter. 
Chronique de la dérive douce de Dany Laferrière : un roman que j'ai dévoré dans les meilleures conditions possibles, puisque je l'ai lu dans l'avion qui m'emmenait à Montréal avant le début de mon année d'échange là-bas, découvrant l'histoire de l'époque où l'écrivain posait lui-même les pieds dans cette ville pour la première fois, il y a quelques décennies déjà. Rien à redire : je suis amoureuse de la plume de Laferrière, de ses divagations, de ses délires poétiques, de son sens inouï de l'imagerie. Le roman fait moins de 200 pages, pas d'excuse : il faut dès maintenant vous jeter dessus, goûter à la torpeur de l'été québécois et à l'intransigeance de son hiver, et plus largement au désarroi de l'étranger et à l'émerveillement de celui qui se fait petit à petit une place dans un nouveau chez-lui. 
La Maison aux Esprits d'Isabel Allende : splendide lecture, un classique à vrai dire un peu intimidant pour qui ne l'a pas encore découvert, qui s'avère incroyablement envoûtant, amusant et touchant dès lors qu'on se laisse séduire par la plume fantastique d'Isabel Allende, dont l'imagination sans limites offre une fresque familiale fascinante, absurde, réjouissante, dramatique, pour un texte qui représente tout ce que j'adore dans le réalisme magique. 
La Supplication de Svetlana Alexievitch : après l'incroyable mini-série Chernobyl d'HBO (oui, très original de dire ça, je sais), il me fallait mettre les mains sur cet ouvrage de la prix Nobel Svetlana Alexievitch, dont les créateurs de la série ont expliqué qu'ils s'étaient énormément inspirés lors du processus d'écriture et de réalisation de leur oeuvre. Guidé par le grand talent d'Alexievitch pour structurer des récits entièrement constitués de témoignages réels, on découvre avec effroi des histoires si épouvantables qu'il est douloureux de réaliser qu'elles n'ont rien de fictif. Une grande leçon d'histoire, d'(in)humanité, de responsabilité. Pour le dire en quelques mots : lire ce livre, ça vous remet deux trois idées en place.

Et vous, quelles ont été vos plus belles lectures de l'année ? 

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