Que lire en temps de confinement ? [Littératurpitudes]

Bonjour à toutes et tous, 

Avant tout, j'espère que vous et tous vos proches vous portez bien et que vous êtes en sécurité, et que vous arrivez à garder le moral autant que possible en ces temps perturbés ! Avec le confinement, il est vrai qu'on se retrouve quelque peu démuni, voire frustré de se voir à ce point limité, mais s'il est bien une chose qu'on aura encore et toujours à sa disposition et qui permet de nettement adoucir les situations même les plus mornes et déprimantes, ce sont...
Oui, ce sont les livres.
Je sais, pas super surprenant.
En même temps, ça fait six ans que je tiens un blog littéraire, je ne sais pas à quoi d'autre vous vous attendiez de ma part.

Lire, certes, très bien.
Mais quoi ?
De quoi a-t-on envie lorsqu'on tourne en rond dans son appartement plus ou moins aéré ? 

Après une longue et plus ou moins fructueuse réflexion personnelle, j'ai distingué quatre catégories d'ouvrages à mon sens particulièrement adaptés à une envie d'évasion, d'apaisement ou de divertissement :

1 - Les romans dépaysants, intenses, de genre, la fantasy, la SF, le fantastique, les univers parallèles parsemés de pouvoirs magiques hypnotiques, les sagas, les personnages éloignés de notre réel tout en restant juste assez proches de nous pour nous entraîner avec eux.

2 - Les lectures légères, qui viennent soulager nos méninges torturées comme une douce pommade littéraire pleine de sentiments doux et apaisants.

3 - Les lectures à suspense, celles dont on ne peut pas décemment se détacher, celles qui font tourner les pages jusqu'à en perdre le souffle, les mystères, les intrigues tortueuses, les sprints littéraire.

4 - Pour ceux et celles qui aiment se faire du mal, les romans post-apocalyptiques ou même apocalyptiques tout court, ceux qui cassent tout, le monde, la société, les conventions, ceux qui donnent des frissons et interrogent la possibilité de vivre autrement, de vivre sans, de vivre malgré tout.

5 - Et puis pour ceux et celles pour qui le confinement est synonyme de motivation littéraire renforcée, pourquoi pas découvrir quelques classiques parmi ceux que l'on veut découvrir depuis une éternité sans jamais se rappeler de les attaquer une bonne fois pour toutes...

1 - Une longue saga dans laquelle se plonger sans jamais avoir à relever le nez...

Le Dernier Royaume de Morgan Rhodes : une super saga de fantasy qui n'a a priori l'air de rien, mais qui parvient avec une efficacité redoutable à créer un attachement dantesque entre le lecteur et chacun de ses personnages. On aime surtout ces romans pour leur absence totale et revendiquée de manichéisme, pour la façon subtile dont il révèle les intentions contradictoires de ses protagonistes et la façon dont ils oscillent en permanence entre dévouement personnel pour le bien commun... et instrumentalisation des êtres qui les entourent. 

Phobos de Victor Dixen : le summum de la SF (oui, j'aime faire dans l'emphase), et à mon sens peut-être la lecture la plus adaptée à cette période de limitation spatiale, puisque Phobos décrit l'odyssée de douze jeunes hommes et jeunes femmes vers la planète Mars, alors qu'ils sont confinés (tadam) dans un vaisseau spatial pour plusieurs semaines, chacun charriant avec lui ses espoirs, ses handicaps et son envie brûlante d'en découvre et de se trouver, quelque part, ailleurs, ensemble. C'est incroyablement touchant, intéressant, fluide, chaque tome se conclut d'une façon plus déchirante que le précédent, c'est à la fois très accessible et très très riche pour qui s'y penche de plus près et commence à déchiffrer le sous-texte de l'histoire, c'est une saga que je recommanderais les yeux fermés à à peu près n'importe qui disposant de quelques heures de temps libre. Foncez. Décollez. N'en revenez pas.

La Passe-Miroir de Christelle Dabos : la meilleure saga de fantasy d'absolument tous les temps (je ne prendrai aucune critique et pas plus de réclamations). Je pourrais m'arrêter là, mais cette saga mérite mieux, alors je me contenterai de jeter en vrac des tas d'adjectifs et qualificatifs laudatifs (vive les rimes en -if) : fantastique, pléthorique, cosmique, ambitieux, étourdissant, enchanteur, frissonnant (je sais, ça ne veut rien dire, je m'en fiche, je suis enthousiaste), palpitant, surprenant, vibrant, bref, c'est fantastique, allez, s'il vous plaît, foncez, et ce quel que soit votre âge ou votre degré de connaissance de la littérature de l'imaginaire. Ça plaira vraiment, vraiment à tous et toutes. 

2 - Des lectures légères...

The Seven Husbands of Evelyn Hugo ou Daisy Jones and the Six de Taylor Reid Jenkins : si je devais avoir une grippe demain - ou autre chose, mais bon, on ne se le souhaite pas -, ce serait sans doute vers l'un ou l'autre des romans de cette autrice que je me tournerais. C'est l'équivalent littéraire d'une bonne série réconfortante pleine d'intrigues amoureuses et d'ambitions fracassantes, dont on sait qu'elle livrera toute sa cargaison de retournements stupéfiants et de personnages torturés, et à laquelle on ne demande rien d'autre que de faire passer le temps avec légèreté et distraction.

Fangirl de Rainbow Rowell : même chose, parfaite lecture-doudou, une histoire de coming of age comme disent nos amis anglophones, de découverte de soi, de passage à l'âge adulte, qui décrit avec pas mal de justesse la relation complexe entre deux soeurs jumelles de plus en plus éloignées l'une de l'autre, le désir d'écrire, de créer en général, de grandir mais pas trop, et la peur de perdre de vue l'enfant qu'on a été.

3 - Des lectures à suspense...

Les Garçons de l'Ete de Rebecca Lighieri : je sais, je le recommande vraiment constamment, celui-là, mais promis, vous m'en remercierez lorsque vous constaterez qu'il vous aura volé quelques heures de lecture éberluée, passionnelle, révoltante. C'est fabuleux, ce roman. Aussi fabuleux que terrible. Une histoire de déchirure familiale, de jalousie, de vengeance(s). Avec beaucoup de soleil, de plage et de surf en prime. Que demande le peuple. 

La Petite Femelle de Philippe Jaenada : j'ai l'impression d'avoir déjà chanté mon amour pour ce roman sur mille air différents (figurativement, pas littéralement hein), mais bon, je l'aime tant que ça ne me dérange pas vraiment. L'enquête tortueuse (et un peu torturée) d'un écrivain interpellé par un ancien fait divers, déterminé à comprendre ce qui a bien pu pousser une jeune femme tout à fait ordinaire, Pauline, à tuer son ancien petit ami, plusieurs décennies auparavant, dans un monde où les femmes se taisaient encore davantage qu'aujourd'hui. 

Amelia de Kimberley McCreight : un roman que j'ai lu il y a un petit bout de temps déjà, en voyage, mais dont je me souviens qu'il m'avait particulièrement captivée, avec son ton poignant et son suspense touchant. L'histoire d'une mère déterminée à faire la lumière sur la disparition de sa fille, qui réalise petit à petit que son Amelia adorée n'était peut-être pas exactement l'adolescente qu'elle a toujours connue - à moins que ce ne soit justement ce que des personnes mal intentionnées cherchent à lui faire croire ? Sombre, certes, mais très délicat dans son traitement.

4 - Pour celles et ceux qui veulent se faire du mal / Se mettre dans l'ambiance...

Dans la Forêt / Into the Forest de Jane Hegland : l'un de mes romans préférés du monde entier (mon roman préféré tout court avec Aurélien d'Aragon ? C'est possible, ça se débat). Il faut le lire, c'est brutal, violent, réaliste, bouleversant, sublime, ça parle de fin du monde bien sûr, de l'amour qui reste, qui change, qui se fait brutaliser mais n'en ressort que grandi, de ce qu'on conserve, de ce qu'on abandonne, de la joie et de la tristesse mêlées avec lesquelles on se retrouve forcé à évoluer lorsque le monde change sans que l'on ne puisse le contrôler. J'aime. Ce. Livre. Et vous l'aimerez aussi. 

Le Mur Invisible de Marlen Haushofer : fabuleux roman découvert l'an dernier à la suite d'un petit engouement de tout un tas d'amies lectrices, l'histoire d'une femme brusquement coupée du reste du monde par un... mur invisible (logique), qui comprend petit à petit qu'elle est probablement l'une des dernières âmes encore en vie sur Terre, et doit mettre en place des stratégies pour survivre, continuer à vivre, encore et toujours. 

U4 de Vincent Villeminot, Carole Trébor, Florence Hinckel et Yves Grevet, si vous êtes vraiment des fous : une très chouette tétralogie qui avait fait pas mal de bruit au moment de sa sortie, et qui décrit justement comment un virus dévastateur décime 90% de la population à l'exception des adolescents entre 15 et 18 ans (oui, on part sur un bon virus bien sévère). Globalement, c'est le chaos.
On suit à partir de là quatre adolescents, un par roman, aux trajectoires croisées, tous dirigés vers un mystérieux rendez-vous lancé par un individu qui prétend détenir une forme de solution au désastre qui a eu lieu en France comme partout dans le reste du monde. C'est très bien construit, très prenant, inquiétant juste comme il faut, bref, on adore. 

Shining de Stephen King : un roman qui tombe d'ailleurs aussi dans la catégorie des romans à suspense (huis-clos, lente escalade de la folie, suggestion horrifique...), et dont je ne peux que recommander la lecture si vous êtes attirés par son intensité dramatique, la légende noire et intrigante qui entoure cette histoire mythique, et la façon magistrale qu'a King d'organiser son récit. Tous les romans de King ne sont pas des chefs-d'oeuvre, mais pour le coup, il est assez indiscutable que Shining relève de cette catégorie-là.

5 - Des classiques denses sans être rébarbatifs...

N'importe quoi de Zola. Parce que Zola, c'est la vie. Et que c'est à peu près aussi addictif, sinon plus, que bien des séries télé. Si, si, pour de vrai.
Si vous voulez des titres en particulier, optez pour La Fortune des Rougon, Nana ou Au Bonheur des Dames. 

Les Liaisons Dangereuses de Laclos : un roman épistolaire passionnel et passionnant à l'heure où l'on s'abreuve plus que jamais de correspondances (numériques, certes, mais tout de même), quoi de plus approprié ? L'un de mes classiques préférés, sulfureux, captivant, estomaquant, bref, on aime, on adore. 

(Et je n'en parle pas, parce que j'en ai déjà beaucoup trop parlé. Mais j'en parlerai quand même, juste un peu. Lisez Aurélien et Belle du Seigneur. Allez. Allez. Promis c'est fabuleux).

Sur ce, je vous envoie toutes mes bonnes ondes, et en croisant les doigts pour que le confinement se passe de la façon la plus apaisée et rapide pour vous !