La Vraie Vie d'Adeline Dieudonné - Chronique n°440
Titre : La Vraie Vie
Autrice : Adeline Dieudonné
Editions : L'Iconoclaste
Genre : Contemporain | Littérature générale
Lu en : français
Résumé : Chez eux, il y a quatre chambres. Celle du frère, la sienne, celle des parents. Et celle des cadavres.
Le père est chasseur de gros gibier. Un prédateur en puissance. La mère est transparente, amibe craintive, soumise à ses humeurs.
Avec son frère, Gilles, elle tente de déjouer ce quotidien saumâtre. Ils jouent dans les carcasses des voitures de la casse en attendant la petite musique qui annoncera l’arrivée du marchand de glaces. Mais un jour, un violent accident vient faire bégayer le présent. Et rien ne sera plus jamais comme avant.
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C'est l'un des romans "gagnants" de la rentrée littéraire, l'un de ces premiers romans dont on se glisse le nom entre deux rayonnages à la librairie, ceux qui provoquent des pâmoisons d'admiration chez les critiques, ceux dont les notes ne semblent faire que grimper sur tous les réseaux sociaux littéraires.
Mais qu'est-ce, au juste, que ce drôle de petit livre ?
La Vraie Vie, ce sont cinq étés successifs, un continuum qui fait glisser une petite fille vers l'adolescence, avec toujours un même objectif en tête : trouver un moyen de voyager dans le temps, de remonter vers une journée étouffante, celle de l'accident, et tout changer.
Quel accident ?
Un moment de mort, la perte de l'innocence, un moment de violence, une rupture après quoi rien n'a plus jamais été pareil, ni pour notre narratrice, ni pour son petit frère, l'élément qui a achevé de détruire cette famille déjà loin d'être fonctionnelle.
Mais la petite fille est déterminée. Et elle a de la ressource.
Commence alors une entreprise déterminée et dévorante : rassembler toute la connaissance scientifique qui pourra lui être utile pour mener à bien son projet. Et apprendre quelques leçons - autres que des formules de physique - en chemin.
On a parfois cette expression pour signaler qu'un récit commence doucement, "sans crier gare", mais justement, La Vraie Vie commence en criant gare, garde à vous, attention, ceci est un territoire explosif, cette histoire ne va pas prendre de gants.
C'est d'autant plus glaçant que c'est décrit avec ce détachement et cette absence d'affect qu'ont parfois les enfants : l'abus familial, la violence du père, la peur, partout, tapie, et enfin la fuite pratiquée comme un art par une mère qui a oublié comment il fallait s'y prendre pour exister il y a longtemps déjà.
Dans ce foyer toxique, une petite fille, son petit frère Gilles à qui elle tient plus que tout, jusqu'à ce qu'éclate entre eux deux l'accident, et la lente quête qui s'ensuit.
Le récit défile avec une plume survoltée et remarquablement juste, qui donne à voir les espoirs et les ressentis de la narratrice avec une crédibilité implacable, et fait couler les quelques 250 pages du roman dans une folle fluidité - pour une fois, on peut vraiment dire qu'il s'agit d'un texte qu'on ne peut que lire d'une traite.
Mais si l'histoire est brève, elle n'en est pas moins intense qu'une autre, c'est même le contraire : les scènes renversantes, touchantes, choquantes, piquantes sont pléthore, avec un sens de la description et de l'immersion diaboliquement efficace. Adeline Dieudonné parvient à créer un ensemble de petits tableaux marquants, qui viennent se juxtaposer pour former une oeuvre absolument originale, absolument réjouissante, absolument révoltante.
L'héroïne à laquelle elle donne vie est un petit bijou de spontanéité et de vie, une de ces figures que l'on pourrait suivre sans difficulté pendant des milliers de pages, et à laquelle on s'attache donc d'autant plus que le temps que l'on va passer avec elle est limité. Vive, fantasque, excessive, terriblement touchante, dure parfois, elle constitue un protagoniste efficace parce qu'on peut se reconnaître dans sa personnalité dans un paragraphe, et s'en distancier dans celui d'après.
Le tout s'engloutit avec délices et frissons, dans une bourrasque de péripéties et de déconvenues qui font tour à tour rire et trembler. On retient le roman pour son portrait tout en simplicité de cette jeune fille sublime de détermination, pour son écriture mature et assurée, ainsi que, pourquoi pas, pour son insolence et sa façon originale et frappante de décrire les abus familiaux, la violence conjugale, le passage à l'âge adulte et - attention, alerte expression mièvre - le pouvoir et la force du rêve.
Parce que peut-être qu'au fond, La Vraie Vie, c'est avant tout un rêve.
La Vraie Vie, ce sont cinq étés successifs, un continuum qui fait glisser une petite fille vers l'adolescence, avec toujours un même objectif en tête : trouver un moyen de voyager dans le temps, de remonter vers une journée étouffante, celle de l'accident, et tout changer.
Quel accident ?
Un moment de mort, la perte de l'innocence, un moment de violence, une rupture après quoi rien n'a plus jamais été pareil, ni pour notre narratrice, ni pour son petit frère, l'élément qui a achevé de détruire cette famille déjà loin d'être fonctionnelle.
Mais la petite fille est déterminée. Et elle a de la ressource.
Commence alors une entreprise déterminée et dévorante : rassembler toute la connaissance scientifique qui pourra lui être utile pour mener à bien son projet. Et apprendre quelques leçons - autres que des formules de physique - en chemin.
On a parfois cette expression pour signaler qu'un récit commence doucement, "sans crier gare", mais justement, La Vraie Vie commence en criant gare, garde à vous, attention, ceci est un territoire explosif, cette histoire ne va pas prendre de gants.
C'est d'autant plus glaçant que c'est décrit avec ce détachement et cette absence d'affect qu'ont parfois les enfants : l'abus familial, la violence du père, la peur, partout, tapie, et enfin la fuite pratiquée comme un art par une mère qui a oublié comment il fallait s'y prendre pour exister il y a longtemps déjà.
Dans ce foyer toxique, une petite fille, son petit frère Gilles à qui elle tient plus que tout, jusqu'à ce qu'éclate entre eux deux l'accident, et la lente quête qui s'ensuit.
Le récit défile avec une plume survoltée et remarquablement juste, qui donne à voir les espoirs et les ressentis de la narratrice avec une crédibilité implacable, et fait couler les quelques 250 pages du roman dans une folle fluidité - pour une fois, on peut vraiment dire qu'il s'agit d'un texte qu'on ne peut que lire d'une traite.
Mais si l'histoire est brève, elle n'en est pas moins intense qu'une autre, c'est même le contraire : les scènes renversantes, touchantes, choquantes, piquantes sont pléthore, avec un sens de la description et de l'immersion diaboliquement efficace. Adeline Dieudonné parvient à créer un ensemble de petits tableaux marquants, qui viennent se juxtaposer pour former une oeuvre absolument originale, absolument réjouissante, absolument révoltante.
L'héroïne à laquelle elle donne vie est un petit bijou de spontanéité et de vie, une de ces figures que l'on pourrait suivre sans difficulté pendant des milliers de pages, et à laquelle on s'attache donc d'autant plus que le temps que l'on va passer avec elle est limité. Vive, fantasque, excessive, terriblement touchante, dure parfois, elle constitue un protagoniste efficace parce qu'on peut se reconnaître dans sa personnalité dans un paragraphe, et s'en distancier dans celui d'après.
Le tout s'engloutit avec délices et frissons, dans une bourrasque de péripéties et de déconvenues qui font tour à tour rire et trembler. On retient le roman pour son portrait tout en simplicité de cette jeune fille sublime de détermination, pour son écriture mature et assurée, ainsi que, pourquoi pas, pour son insolence et sa façon originale et frappante de décrire les abus familiaux, la violence conjugale, le passage à l'âge adulte et - attention, alerte expression mièvre - le pouvoir et la force du rêve.
Parce que peut-être qu'au fond, La Vraie Vie, c'est avant tout un rêve.
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Pour les curieux et curieuses parmi vous, l'interview qui m'a donné envie de découvrir le roman sur lequel je viens de disserter :
J ai juste adoré ce roman .
RépondreSupprimerTu as vraiment trouvé les mots justes.
Des bises !