Caraval de Stephanie Garber - Chronique n°373

“No one is truly honest,” Nigel answered. “Even if we don't lie to others, we often lie to ourselves. And the word good means different things to different people.”

Titre : Caraval
Auteure : Stephanie Garber
Genre : Fantasy
Editions : Hodder and Stoughton
Lu en : anglais
Nombre de pages : 402
Résumé : Scarlett Dragna has never left the tiny island where she and her sister, Tella, live with their powerful, and cruel, father. Now Scarlett’s father has arranged a marriage for her, and Scarlett thinks her dreams of seeing Caraval—the faraway, once-a-year performance where the audience participates in the show—are over.


But this year, Scarlett’s long-dreamt-of invitation finally arrives. With the help of a mysterious sailor, Tella whisks Scarlett away to the show. Only, as soon as they arrive, Tella is kidnapped by Caraval’s mastermind organizer, Legend. It turns out that this season’s Caraval revolves around Tella, and whoever finds her first is the winner.

Scarlett has been told that everything that happens during Caraval is only an elaborate performance. Nevertheless she becomes enmeshed in a game of love, heartbreak, and magic. And whether Caraval is real or not, Scarlett must find Tella before the five nights of the game are over or a dangerous domino effect of consequences will be set off, and her beloved sister will disappear forever.

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Existe également en français

Titre : Caraval
Editions : Bayard
RésuméBienvenue à Caraval ! Le spectacle le plus extraordinaire de tous les temps ! Vous y verrez plus de merveilles que le commun des mortels au cours de toute une vie. Mais avant que vous vous plongiez dans notre univers, gardez à l'esprit qu'il s'agit d'un jeu... Nous tenterons de vous convaincre que ce qui se passe au-delà de ce portail est réel, mais ce n'est qu'illusions. Alors prenez garde à ne pas trop vous laisser emporter. Car les rêves qui se réalisent peuvent être magnifiques, mais ils peuvent aussi se transformer en cauchemars si l'on ne se réveille pas...

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I have been looking forward to reading this book for ages.

And I finally have read it.
And I have to admit I am quite disappointed.


To me, this book was born from creative and whimsical ideas, written with passion and will... But the author did not manage to produce much more than a confusing pandemonium. The novel is even more frustrating to read that one can distinguish some good initiatives and intuitions, but tangled in an unsatisfying blurb of descriptions and random metaphors.


Let's talk about metaphors.

Metaphors are great. I support the generalized use of metaphors. Metaphors make life greater.

But metaphors are a dangerous game to play at. If only you chose the wrong combination, they can become dull, cliché, naive, or even ridiculous.
Stephanie Garber loves metaphors, too, and I definitely can rely to that.

But putting together some nice-looking words without any coherence does not constitute a powerful and judicious metaphor, unfortunately. Just see for yourself :

"He tasted like midnight and wind"
"Sad like fresh cut wood"
"Something acidic and moldy and burnt [...] : the taste of death"

I'm deeply sorry, but those choices of word do not make any sense. Of course, they look nice, they produce some kind of mystique effect, but they are not satisfactory on a literary plan. Good metaphors need coherence to awake the reader's sensibility. And maybe I'm being psychorigid, but to me, fresh cut wood has never and will never be sad. 

Anyway, that was just a personal opinion of mine, that nevertheless did not help me enjoying the storyline... which was again, a tiny disappointment.

Do not get me wrong: this book is quite entertaining, has a nice pace and some exciting twists. But nothing outstanding. Nothing like the bewitching tale one might expect, nothing like an unprecedented fantastic odyssey. 
A hint of fear, a lot of romance and a magical universe, with a very disturbing core. 
Again, nothing one would not manage to find in another book. 

The setting is highly problematic: not because it is unrealistic, which is just a component of a fantasy novel, but because it feels illogical and shaking. This universe does not have any solid base, any introduction or description. We never know what is at stake with all of these dimensions, time distorsions and contradictions all over the place. A reader will always agree with some fiction, some foreign rules, but he should also be allowed some consistancy, some attachment to the world he is trying to picture, and some soul to it. Caraval's world is just an amount of islands with vaguely Spanish-sounding names, weird customs and crazy lunatic people. Things just happen, out of the blue, without you expecting them or thinking of them later on. One cannot feel involved in such a undefined setting. And that is a shame, because involvement is the one element that makes a book striking.

Another fundamental problem: the characters. Again, readers do not need angelic, entirely kind and completely altruist characters to feel attachment towards them. The one thing they need is personality. 
Which all of the characters introduced in the novel lack. 
The main character, Scarlett is simply infuriating, acting based on her impulsions - which might be okay is only those impulsions had any kind of logic. Unfortunately, she does not manage to outreach the vaguely-bland-but-certainly-annoying-heroine status, whose aspirations never contribute to our interest to the story. 
On the other hand, much of the characters' cast does not have a paper important enough to mark its print on the story, the romance is boringly predictable and even the "evil" characters never awake any kind of excitement or fear.

A "catch-all" story is not a creative one. An unpredictable and not grounded enough tale is not an exciting one. That is a subtle nuance... But Caraval missed it. 
Caraval is not a bad book: it certainly remains enjoyable, nicely-paced, and even conducive to some reverie for some readers. But do not expect something out of the common like I did.

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Caraval faisait à n'en pas douter partie des romans de 2017 qu'il me brûlait le plus de découvrir.
Oui. Brûler. Carrément

La déception en est d'autant plus amère. 
Pas de malentendus : il ne s'agit pas d'un mauvais roman. Mais en tout cas certainement pas de la petite pépite d'originalité et d'onirisme que j'espérais. 

Caraval fait malheureusement une erreur d'interprétation, sur tous les plans. Ce roman devait être enchanteur, époustouflant, à la fois déstabilisant et prenant, fait de péripéties et de jeux d'illusions. Et il a de toute évidence été pensé et écrit dans cette optique, avec la volonté de créer la surprise et la passion chez le lecteur. Le résultat n'est malheureusement pas au rendez-vous : le rendu manque cruellement de cohérence d'ensemble, d'équilibre, de corps, d'enjeu.

Car ce n'est pas tout de lancer en l'air une multitude d'idées fantasques, d'imposer des règles sorties de nulle part qui déforment la réalité, ou de laisser aller le récit au fil de ses impulsions. 
Encore faut-il cette cohérence d'ensemble évoquée plus haut. 

Il ne s'agit pas d'être réaliste, évidemment ! Une oeuvre de fiction n'exige pas de réalisme stricto sensu, mais la construction solide d'un univers parallèle, avec ses propres codes, ses propres enjeux, suffisamment bien établis pour que l'on puisse se les approprier et alors seulement se plonger dans l'oeuvre. 
Ce n'est pas le cas dans Caraval

Le cadre est d'une superficialité effarante : quelques îles éparses, des noms aux consonances vaguement hispaniques, des personnages lunatiques et une espèce de gros embrouillamini spatio-temporel... Rien qui ne forme un attachement, une atmosphère globale. Mais le plus problématique reste l'extériorité du lecteur aux événements qui se succèdent : comme les règles sont inventées au fur et à mesure, le lecteur ne se sent ni concerné ni frappé. C'est le principe du set-up/pay-off : si vous voulez qu'un retournement de situation ou une révélation affecte le public, il faut en poser les bases, laisser des indices. Par exemple, tout le film Retour vers le futur est une sorte de gigantesque set-up pay-off, et la montre dans Interstellar peut aussi en être un. 
Bref, tout cela pour dire que Caraval passe à côté de cet élément essentiel. Les péripéties rocambolesques auront beau se succéder, on ne ressentira rien. 

Le travail sur les personnages reste par ailleurs très superficiel, ce qui n'aide p-as. On ne demande pas des figures angéliques pleines d'abnégation et d'altruisme, non, simplement des êtres avec du relief. De la personnalité. Et le moins que l'on puisse dire, c'est qu'on n'est pas gâté, entre une héroïne ennuyeuse à mourir qui alterne entre trois sujets de préoccupation - "il est beau Julian, mais il est méchant / elle est où Tella ? / c'est bizarre par ici" -, des personnages secondaires qui disparaissent aussi vite qu'ils naissent et de façon générale, des protagonistes qui ont besoin de longs et mornes monologues pour exposer leurs intentions. 

Enfin, il me faut revenir sur un point crucial. 
Celui des métaphores.

J'aime les métaphores. Les métaphores rendent la vie plus belle. Mais on ne fait pas des métaphores n'importe comment. Il y a un minimum syndical de sens à respecter pour ne pas tomber dans le niais, le cliché, ou pire, l'aberrant et l'absurde. Voyez plutôt : 

"Il avait le goût de minuit et du vent"
"triste comme du bois fraîchement coupé"
"quelque chose d'acide et de moisi et de brûlé [...] : le goût de la mort"

[traductions de moi-même]

La métaphore repose sur la logique, le sens du comparant et du comparé. Evidemment, mettre à côté des jolis mots qui sonnent bien, c'est parfait en principe, mais dans les faits, cela revient littéralement à de l'arnaque esthétique. La métaphore fonctionne si elle éveille la sensibilité du lecteur, si elle fait appel à ses sens de façon subtile et évocatrice. Pas si elle juxtapose juste pour la beauté du geste des images vaguement mystiques et totalement inappropriées. 

Quelqu'un ici a déjà dit qu'il se sentait triste comme du bois ? EST-CE QUE LE BOIS EST TRISTE ? 
Je suis peut-être psychorigide, certes. Mais ma sensibilité de littéraire est heurtée. 


Encore une fois, Caraval n'est pas un mauvais roman. Il est moyen. Il remplit globalement sa mission de divertissement, il déroule son intrigue à un rythme plutôt agréable, et finalement propose une multitude de décors et de péripéties, mais rien que de très oubliable et surtout trouvable ailleurs... Certes, il a une certaine originalité dans ses intentions et sa juxtaposition douteuse de mots qui sonnent bien, mais encore une fois, absolument pas l'odyssée fantastique et féerique que j'attendais. Rien de plus ici qu'une romance dans un contexte vaguement exotique sur fond d'enquête.
Autrement dit, rien de nouveau sous le soleil. 



Commentaires

  1. J'aime beaucoup ta critique ! J'avais pas relevé exactement les mêmes défauts, mais ce livre m'avait déçu également : c'était pas la chasse au trésor à laquelle je m'attendais :/

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  2. Et qu'est-ce que tu avais remarqué, comme défauts de ton côté ? En tout cas, ravie de voir que je ne suis pas seule dans mon imperméabilité à ce roman x)

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    1. (Oui je réponds 10 ans après ^^).
      Hé bien je m'attendais à une histoire pleine de mystère, limite une enquête avec de vrais indices que le lecteur pourrait essayer de résoudre aussi. Alors que là les quelques indices sont hyper vagues et Scarlett fait des déductions qui sortent de nulle part. Et j'ai eu l'impression qu'elle et Julian passaient leur temps à se balader ou à fuir plutôt qu'à jouer/mener l'enquête.
      Et j'avais pas spécialement accroché aux personnages pas vraiment attachants :/

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    2. (je te pardonne même si c'est vrai que c'est limite un crime de répondre aussi tard)
      On est d'accord, en fait j'ai l'impression que tout est gratuit dans le roman. L'auteure balance des trucs à droite à gauche mais comme elle ne prévient jamais, elle n'introduit rien, il n'y a pas d'enjeux. Les personnages pourraient tous mourir et on s'en remettrait tout de suite... Et il y a un gros souci sur le travail de l'atmosphère oui !

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  3. Bravo pour ta chronique qui fait écho à ce que j'ai pu ressentir pendant ma propre lecture. Je m'attendais à une escapade onirique et quelque peu déboussolante voire un peu effrayante. Et même si j'ai réussi à trouver des qualités à l'univers, l'intrigue et les personnages sont juste grotesque, en particulier les deux sœurs qui m'ont exaspéré tout du long. Il n'y en a pas une pour rattraper l'autre. Et la fin qui laisse le lecteur en suspense m'a également bien énervée, me donnant envie sur le moment de lire la suite. Maintenant avec davantage de recul, je ne suis pas sûre de renouveler l'expérience avec cette saga.

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    1. Oui, tout est caricatural en fait, rien n'est justifié. On a l'impression d'avoir un énorme "kif" d'auteur pendant 300 pages, ce qui n'a rien de mal hein, mais n'est juste pas optimal quand on aimerait une vraie plongée dans de la fantasy x) Et je ne pense pas poursuivre l'aventure moi non plus, malheureusement... Malgré la sublime couverture du second tome !

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  4. Il y a pas mal d'avis mitigés sur ce livre quand même :/ Je l'ai dans ma PAL et j'ai un peu peur de le lire quand même...

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    1. Tu peux toujours tenter l'expérience, mais parole de Capucine, ne t'attends pas à quelque chose d'extraordinaire ou tu risques d'être déçue x)

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  5. J'arrive longtemps après la guerre sur cette chronique mais je ne peux m'empêcher de commenter tellement tes propos font échos à mon propre ressenti. Merci, merci pour ton mot sur les métaphores. ça m'a juste exaspérée, ça ne veut rien dire. Quant aux persos, j'ai été atterrée par le pseudo triangle amoureux et le manque de reliefs dans leur personnalité. J'ai été moins dure dans ma note que toi sur livraddict mais je ne lirais pas la suite, c'est certain !

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